Introduction
Naguère, la technique était dominée par la mécanique, dans son sens le plus concret, matériel, palpable. À présent, […] la dématérialisation que nous offrent les nouvelles technologies nous [invite] à élargir de plus en plus le champ de nos disciplines traditionnelles (Jacomy 2015, 12).
Depuis l’avènement des technologies numériques, certains chercheurs pensent qu’une rupture s’est produite non pas uniquement dans le domaine de la production des images — ce qui est une évidence —, mais quant à la pensée de l’image et de son écriture. Approfondissant, ou délaissant pour un temps, les seuls aspects technologiques de la révolution numérique, d’autres profitent de l’occasion pour s’interroger sur la provenance de cette pensée et de cette écriture en espérant trouver quelques réponses auprès de philosophes. Des ouvrages, dont celui de Stéphane Vial, mettent l’accent sur le fait que « la révolution numérique fonctionne […] comme une révélation numérique : elle nous fait découvrir que la question de l’être et celle de la technique sont une seule et même question. Parce que si cela a toujours été vrai, cela n’a pas toujours été visible » (Vial 2013, 27). Poursuivant sur sa lancée, Vial y discute d’« ontophanie » en liant le phénomène numérique à une approche phénoménologique : « […] la technique est une structure de la perception, elle conditionne la manière dont le réel et l’être nous apparaît. Autrement dit, toute ontophanie du monde est une ontophanie technique » (2013, 99). L’être et la technique paraissent tantôt intimement liés, tantôt désolidarisés. C’est le cas lorsque, moins informés par la philosophie, certains chercheurs sont eux aussi tentés de mettre à jour d’anciens débats entourant une certaine ontologie plus strictement inspirée par l’évolution technique1.
La mise à jour de cette ontologie, dont il est question en ces pages, semble justifiée par le passage du tupos photonique (argentique) à la pictura numérique ou à l’image de synthèse. Nous aimerions éclairer ce passage, réputé si important. Historiquement, la connaissance qu’avait le spectateur de l’arché — cette étape initiale qu’est le tupos, l’empreinte photonique ou photo-cinématographique — s’est substituée à une autre, certainement plus abstraite. Associée à l’empreinte, la première connaissance de l’arché devait justifier la tendance à faire fi des procédés — bien réels — qui, accompagnant l’empreinte, sont nécessaires à sa création (sélection, mise en scène et cadrage). La seconde connaissance liée à la pictura numérique est, elle, plus impressionnelle, parce que les procédés nous paraissent en effet dématérialisés ; étant assez peu au fait des manières de fabriquer des images et des spécificités des logiciels qui y contribuent, le spectateur tend généralement à leur accorder une si grande importance qu’il oublie, à propos de certaines images numériques, de considérer l’étape initiale de la saisie, ou du tournage et de l’enregistrement des plans à l’aide de la caméra numérique ; or, cette saisie est elle-même archè.
Mais plutôt que de mettre en évidence les différences induites par les changements technologiques que les images ont subis, nous comptons miser sur ce qu’elles ont en commun. Qu’elles soient associées au tupos ou à la pictura, elles ne sont pas si différentes, pas plus que le cinéma ne l’est des jeux vidéo, de la tablette numérique et du téléphone multimédia. Elles ne le sont pas, car elles ont en commun une pensée de l’écran.
Lev Manovich faisait remarquer que :
[le] cinéma se répand petit à petit dans l’ordinateur : d’abord, la perspective linéaire à point de fuite unique ; puis, la caméra mobile et la fenêtre rectangulaire ; ensuite, les conventions de la cinématographie et du montage ; et, pour finir, les personnages numériques calqués sur les conventions de jeu du cinéma. Il en va de même pour le maquillage, le décor et les structures narratives elles-mêmes. Plutôt qu’un langage culturel parmi d’autres, le cinéma devient l’interface culturelle dominante, la boîte à outils de toute communication culturelle, supplantant ainsi l’imprimé (2010, 188).
Si elle avait eu l’occasion de prolonger le propos de l’auteur, Anne-Marie Christin aurait sans doute offert, pour toute réponse, que la « pensée de l’écran » (1995, 247) traverse l’écriture depuis ses origines les plus anciennes. Elle se déploie à partir de la surface, qui est fonction du support. Dans l’esprit de l’auteure, cette pensée de l’écran n’est évidemment pas associée qu’au cinéma, mais au support en tant qu’il est, en un sens, « habité », soumis à des peintures de mains, à des traces, des dessins, des graphies, etc. Bien que très ancienne et durable, cette pensée de l’écran ne mobilise pas la perspective visuelle ou picturale par automatisme. Ce Logos ou ce discours de la raison visuelle qu’est la perspective a longtemps perduré, mais il ne s’agit pas de la seule aventure à laquelle les images se sont prêtées ni la seule à laquelle elles peuvent le faire.
Les nouveaux appareils et, conséquemment, les supports-écrans, qui sont des interfaces, s’offrent à l’écriture et aux écritures. Les fonctions plus ou moins spécifiques de ces appareils vont du jeu, parfois nécessaire à l’effectuation d’un récit, aux systèmes de communication interpersonnel ou collectif. Bien que la remarque soit incidente, notons que, parce qu’ils ont intégré notre culture, ces appareils sont revenus dans l’écran du cinéma sous la forme d’une fréquentation intermédiale, devenue utile sur le plan de la représentation — vraisemblable — du quotidien. Considérant ce phénomène dans l’autre sens (hors du cinéma), il est aisé de concevoir que, dans notre quotidien, nous croisons un grand nombre de systèmes d’expression ou de représentation. Ce croisement est, par lui-même, intermédial (ce phénomène très ancien est informé par la pensée de l’écran). Nombre de systèmes sont intermédiaux. Suivant la tradition, on dira que leur sémiotique ne manque pas de rester ouverte sur d’autres sémiotiques, orale ou écrite — visuelle ou linguistique.
Il n’empêche que, relativement au quotidien et aux systèmes assortis aux domaines de l’expression ou de la représentation, le passage du support argentique à l’appareil numérique est époqual. La perspective théorique sur la voie de laquelle nous nous sommes engagés collectivement fait, en effet, époque au point que nous parlions désormais d’une « culture numérique ». Parce qu’elle existe et qu’elle est ainsi nommée, elle laisse présumer le basculement d’une autre culture — non numérique celle-là — vers le passé. L’ancienne culture, dont certaines technologies numériques s’avèrent les passeuses, comprend, bien sûr, des images (publicités, peintures, films, etc.), de même que des philosophies, des études historiques et sociologiques. Les humanités numériques trouvent dans les approches philosophiques et les études historiques et sociologiques les réflexions susceptibles de contribuer à leur définition et à l’établissement de ses différences relativement aux humanités qui, par hypothèse, ne seraient pas numériques, c’est-à-dire toutes les autres. Suivant une fois encore la tradition, on conçoit que les humanités numériques visent une meilleure compréhension de l’incidence des technologies sur la pensée, les sociétés, la pensée des sociétés.
Le passage de l’argentique au numérique inviterait ainsi à repenser l’histoire des imaginaires de l’écriture de l’image, voire, comme il a été dit, à rouvrir d’anciens débats entourant l’ontologie en vertu de laquelle l’histoire, l’imaginaire et l’écriture méritent un éclairage particulier. Ces trois thèmes forment une tresse conceptuelle, car l’Histoire dépend de l’écriture ; l’écriture de l’image est sujette à des imaginaires ou à certaines conceptions qui ont paré son histoire (d’où le néologisme « imag-inaire ») et, enfin, chacune des images apporte son tribut à l’Histoire et à l’historicité.
L’Histoire et l’écriture
Questionnant l’écriture de l’Histoire, Paul Ricœur propose l’examen des déclinaisons platoniciennes de la « trace ». Elles couvrent la « trace écrite sur un support matériel, [l’]impression-affection “dans l’âme”, [l’]empreinte corporelle, cérébrale, corticale » (2000a, 18). Un événement peut faire-empreinte dans la mémoire en ce qu’il a suscité une (dé)charge affective. Dans ces conditions, la personne en conserve la trace. Elle est susceptible d’avoir des représentations plus ou moins vives ou des impressions inégalement claires des événements dont il s’est agi. Ricœur, qui qualifie Matière et mémoire de « maître-livre » (2000b, pp. 731-747) , y puise quelques propositions qui ont trait à l’empreinte corporelle, cérébrale, corticale.
Pour comprendre la relation impliquée entre une image extérieure (qui engendre une empreinte cérébrale ou corticale par exemple) et une image intérieure (l’impression-affection « dans l’âme », suivant l’expression de Platon que cite Ricœur), Henri Bergson considère la position des matérialistes et des dualistes et, plus loin, celle des réalistes et des idéalistes. Il précise que l’image relève aussi bien de l’extériorité que de l’intériorité, puisque :
[…] dans un cas comme dans l’autre, ce sont des états de notre système nerveux que la perception est censée dessiner ou traduire. […] Toute image est intérieure à certaines images et extérieure à d’autres ; mais de l’ensemble des images on ne peut dire qu’il nous soit intérieur ni qu’il nous soit extérieur, puisque l’intériorité et l’extériorité ne sont que des rapports entre images. […] Or, aucune doctrine philosophique ne conteste que les mêmes images puissent entrer à la fois dans deux systèmes distincts, l’un qui appartient à la science, et où chaque image, n’étant rapportée qu’à elle-même, garde une valeur absolue, l’autre qui est le monde de la conscience, où toutes les images se règlent sur une image centrale, notre corps, dont elles suivent les variations (Bergson 1993, 19‑21).
Outre l’existence d’images à caractère scientifique, dont la fonction diffère des autres images ici soumises à discussion, outre les images accumulées dans la conscience, il nous est permis de penser que les images extérieures, ou les idées transmises et reçues par les matériaux d’écriture, s’inscrivent dans la mémoire, voire, sur le plan sociétal, se constituent en mémoire-monde, mémoire-histoire. Ces images font partie des imaginaires, dont le passage de l’argentique au numérique aurait, semble-t-il, modifié les aspects au point que les perceptions envisagées à partir du corps changent, en même temps que les rapports à l’image, à l’imaginaire de l’image et aux mémoires.
À la suite de Platon, Paul Ricœur faisait remarquer que2 « [la] conjonction présumée entre eikōn et empreinte est [...] tenue pour plus primitive que la relation de ressemblance que met en œuvre l’art mimétique. Ou, pour le dire autrement, il y a mimétique véridique ou mensongère parce qu’il y a entre l’eikōn et l’empreinte une dialectique d’accommodation, d’harmonisation, d’ajustement [de changement] » (2000a, 15, nous soulignons).
Si l’eikōn, la représentation par l’image de l’objet absent, est tenue pour une copie, on ne saurait conclure qu’elle est véridique ou mensongère parce qu’elle est, en vertu de l’empreinte dont elle provient, soumise à « une dialectique d’accommodation, d’harmonisation, d’ajustement [de changement] ». Nous ne saurions le faire, car toute image ou toute représentation, fût-elle présumée véridique, se prête à cette dialectique. Notons par ailleurs que, lorsque l’impression-affection dans l’âme se retrouve sur un support matériel, sa fidélité — toujours relative — dépend de ce que l’eikōn a, à l’aide d’un support quelconque, été l’objet d’une accommodation, d’une harmonisation et d’un ajustement, d’un changement. Un existentialiste radical, dont un certain Sartre constitue la figure de proue, mentionnerait sans doute que la représentation attendue ne se conçoit que lorsque le récepteur de l’image l’y met lui-même. Si ce genre d’accommodation phénoménologique, auquel tout récepteur se prête lors de la lecture, semble plus ou moins faire fi de la matérialité des supports, il a le mérite de questionner les rapports d’identité (de vérité ou de mensonge) entre les images qu’on se fait, qu’on reçoit et celles que l’on fabrique sous la forme d’écritures.
Ricœur fait montre des inspirations platoniciennes qui ont été les siennes tandis qu’il questionne la représentation et l’Histoire. Elles se situent, comme on le verra, au plus près des déclinaisons de la trace, de l’empreinte et de l’eikōn introduites plus tôt. Les rapports à l’identité phénoménologique (ou à celle des faits) et des textes narratifs (qui en parlent) sont au cœur de la discussion :
Entre la représentation mnémonique du début de notre discours [par quoi chacun de nous a des impressions-affections dans l’âme, des traces, des souvenirs autrement dit] et la représentation littéraire située au terme de la trajectoire de l’opération historiographique, la représentation [qui dépend du récit dans le domaine de l’histoire] se propose comme objet, comme référent, d’un certain discours historien. Se peut-il que la représentation-objet des historiens ne porte pas la marque de l’énigme initiale de la représentation mnémonique du passé et n’anticipe pas l’énigme terminale de la représentation historique du passé ? (Ricœur 2000a, 241)
Les questions posées par Ricoeur, qui s’attachent tout d’abord à l’ontologie qui est assortie au domaine de l’Histoire, sont bel et bien les suivantes. D’où vient la représentation ? Est-elle si fermement inspirée par la réalité passée dont l’historien doit rendre compte ? Par les moyens mis à disposition, l’historien peut-il véritablement témoigner des événements passés et offrir des explications suffisantes quant au contexte qui les a suscités ? Le peut-il en empruntant plus ou moins les représentations que des tiers s’en sont faites ou qu’ils ont relatées à l’aide de systèmes de représentation, des représentations-objets, des récits ?
Les accommodations, harmonisations, ajustements exigés semblent avoir une si grande importance que le fait d’ontologie (le fait d’origine) semble relever, pour finir, du travail d’écriture de l’Histoire  L’énoncé qui suit pourrait être tenu pour une réponse quant aux questions précédentes, car il est assorti à la déduction qu’elles inspirent : « […] l’histoire est écriture de part en part : des archives aux textes d’historiens, écrits, publiés, donnés à lire. » (Ricœur 2000a, 302) Ces considérations, encore incomplètes, incitent l’auteur à introduire sur la scène de la discussion le concept de la « représentance »3. Cette dernière implique une intentionnalité plutôt qu’une impression-affection dans l’âme ou un souvenir. L’intentionnalité, dont il parle, aurait un caractère historique. Elle s’éprouve dans la recherche et l’écriture, la recherche de l’écriture. La « lieutenance » se définirait, dans notre esprit, comme une écriture qui, telle une trace, « tient-lieu », évoque et est soumise à une lecture. Elle se conçoit dès que l’historien l’appréhende, la lit ou la lie avec d’autres traces, voire d’autres textes.
Avec les notions de vis-à-vis, de lieutenance ou représentance, nous avons seulement donné un nom, mais nullement une solution, au problème de la valeur mimétique de la trace et, au-delà, au sentiment de dette à l’égard du passé (Ricœur 1985, 255).
La valeur mimétique de la trace est assortie à la réeffectuation du passé ou à sa refiguration par le récit sur le mode de l’Analogue, du comme-si, de la métaphore. Le récit historique tend ainsi à remédier4 à l’absence d’impression-affection dans l’âme (privée ou sociale) et il le fait à la faveur de la trace, des traces écrites sur des supports matériels et, pour inclure ceux sur lesquels le futur historien devra compter, numériques.
Le « faire-histoire » (sa fabrication par la narration et les explications auxquelles elle a recours) reste assorti à une mémoire historiale et à une intentionnalité de ce type. Elle s’accorde, bien évidemment, aux écritures, qui permettent de retracer ou de viser du divers, des faits, voire des événements.
L’analyse de l’historialité du Dasein s’attache à montrer que cet étant n’est pas « temporel » parce qu’il « se tient dans l’histoire », mais, inversement, qu’il n’existe et ne peut exister historialement que parce qu’il est, du fond de son être, temporel (Heidegger 1986, 441).
Le Dasein, celui de l’historien par exemple, se montre soucieux, car destiné à n’être qu’un être pour la fin. Étant un être pour la fin, force est de penser « l’énigme terminale de la représentation historique du passé ». Force est, autrement dit, de considérer l’importance du legs, de laisser des récits de mémoire, des récits pour mémoire, qui, faisant exister d’autres images, susciteront de nouvelles impressions-affections dans l’âme que la conscience (celle du lecteur ou du futur historien) mettra en relation avec d’autres.
Furet disait de cette discipline qu’est l’Histoire qu’elle est la « fille du récit » (Furet cité dans Lagny 1992, 40). Barthes croit que « la narration historique meurt parce que le signe de l’histoire est moins le réel que l’intelligible » (Barthes cité dans Lagny 1992, 41). On comprend dès lors que l’écriture ou les écritures, la lecture et les lectures puissent être si importantes pour les sociétés, à toutes les époques et quels que soient les supports dont c’est le dessein et le destin. Les images numériques ne sauraient être exclues des mémoires-histoire. Elles sont en train d’en constituer de nouvelles, et sans doute d’en faire disparaître d’autres.
L’imag-inaire
Pour Aristote, la phantasma (Ricœur 2000a, 21), le support de l’écriture mis au service de l’expression (pour ne pas dire de l’expressivité), a beaucoup compté, et davantage que l’eikōn, tenue pour une image-copie. Des énoncés là-dessus abondent qui la condamnent. Citons, à titre d’exemple d’une image non matérialisée, Jean Starobinski :
[d]ans la réflexion [à l’aide d’un miroir], l’unité primitive de la conscience se fêle : l’être qui se rapporte réflexivement à lui-même perd la possession entière de soi, qui est le privilège des actes obscurs du sentiment. Se voir réflexivement, c’est rencontrer un fantôme, à la fois proche et jamais rejoint (Jean Starobinski cité par Dagognet 1984, 35).
S’il avait pu, Merleau-Ponty lui aurait sans doute offert cette réponse :
Un cartésien ne se voit pas dans le miroir : il voit un mannequin, un « dehors » dont il a toutes raisons de penser que les autres le voient pareillement, mais qui, pas plus pour lui-même que pour eux, n’est une chair. Son « image » dans le miroir est un effet de la mécanique des choses ; s’il s’y reconnaît, s’il la trouve « ressemblante », c’est sa pensée [et sa peur], qui tisse ce lien, l’image spéculaire n’est rien de lui (Merleau-Ponty 1964, 25).
Entre l’image que renvoie le miroir qui fêle ou dépossède, le modèle et l’aspect trivial de la photographie que Baudelaire dénonçait, l’image-copie a, de fait, longtemps été dépréciée — la faible prise en compte des opérations nécessaires à la fabrication des supposées images-copies a sans doute alimenté la mécompréhension dont elle a été victime. De même, nous vantons les mérites des écritures numériques et des images de synthèse en particulier, bien que nous méconnaissons généralement le travail qui les fait-être.
Cherchant à mettre à jour l’im-matérialité de la pensée (plutôt que la dématérialisation des technologies ainsi que Jacomy nous y invite), soit sa relative absence et sa présence par rapport à la trace d’écriture sur laquelle elle veille, nous entreprenons cette étude du passage du tupos à la pictura au cinéma — ou celui de l’« argentique » au « numérique ».
Il ne s’agira pas de se demander comment l’intentionnalité fondatrice des tupos ou pictura s’exprime dans des images argentique et numérique, car les deux en dépendent. Dans les deux cas, nous tenons pour pertinente l’hypothèse qui suit : « Penser, nous dit Maurice Merleau-Ponty, c’est essayer, opérer, transformer, sous la seule réserve d’un contrôle expérimental où n’interviennent que des phénomènes hautement “travaillés” et que nos appareils produisent plutôt qu’ils ne les enregistrent » (1964, 9). Si la pensée s’exprime par des images au moment où l’on essaie de les produire ou de se-dire avec leur aide, l’inverse est également vrai.
La situation est donc celle-ci : tout ce qu’on dit et pense de la vision [ou de l’image qui la recèle et en vient] fait d’elle [de la vision] une pensée [ou un souvenir pour Bergson] (Merleau-Ponty 1964, 33).
À la fois matérialisé par l’image et im-matériel dans l’image, le « penser » se retrouve aux deux pôles, de la fabrication des images à leur réception. Notons, pour le définir, que le « penser » constitue une invitation faite à la pensée, à l’intentionnalité. C’est ainsi la pensée qui veille à la matérialisation d’images sur les supports et sur ce qu’elle représente sous la forme d’un eikōn, et c’est le « penser » qui est offert en échange sous la forme d’une invitation. Aux termes de la représentance et de la lieutenance, l’eikōn « tient-lieu » ou a le caractère du « penser ». Toutes les images, fussent-elles associées au tupos, à la pictura ou aux technologies numériques ont ce caractère commun.
En ces pages, nous envisagerons le tupos et l’eikōn isolément, c’est-à-dire indépendamment du procédé en vertu duquel l’empreinte (tupos) engendrerait une image (eikōn). Le tupos, généralement traduit par « modèle » ou « marque », se situe au plus près de l’idée de l’empreinte, c’est-à-dire, dans cette partie de notre travail, de l’image obtenue par coup frappé avec le ciseau sur la pierre ou par trace photonique ou photo-cinématographique. L’empreinte dépend immanquablement du travail qui la fait-être. Même en comptant sur une part de reproduction, même en se prêtant au jeu de la ressemblance avec une part de réalité, le travail qui la fait-être dépend des accommodation, harmonisation, ajustement, changement.
L’empreinte est une copie d’un objet absent appelé « imprégnant », qui a minimalement servi à la faire (le moule en forme de canard pour la pâte à modeler, moule qui est lui-même une empreinte effectuée à partir de la sculpture initiale du canard). Dans ce dernier exemple, la production de l’eikōn par empreinte passe par trois étapes : la fabrication ou la sélection de l’imprégnant5, la fabrication, la prise d’empreinte et, enfin, son produit. L’empreinte peut donner à voir un paysage si on l’associe à la photographie argentique et c’est cette réalité intentionnellement visée qui lui sert d’imprégnant.
Bien qu’il ne soit pas d’un même ordre, l’imprégnant pourrait être un ciseau permettant d’engendrer des creux et des bosses. Dans un cas comme dans l’autre, l’aspect « machinique » de l’écriture semble aussi évident qu’insuffisant pour qui veut comprendre l’écriture de l’image ou réfléchir à son ontologie.
Lorsqu’elle n’est plus associée à l’empreinte, l’eikōn peut aussi bien concerner l’ébauche, le croquis, la peinture (la pictura selon le terme qui lui était initialement destiné). À la hauteur de la « trace écrite sur un support matériel », le cinéma argentique serait tout d’abord assorti à un tupos, à une empreinte, tandis que l’image de synthèse le serait à la pictura, ainsi qu’y pense Lev Manovich. Or le cinéma argentique ne procède pas que par tupos et la pictura numérique ne se résume pas aux effets spéciaux qui transforment des saisies ou archés d’origine. Si le cinéma argentique recourt à bien d’autres procédés, dont l’organisation des plans ou des cadres et l’enchevêtrement de séquences menant au récit, le film de synthèse en fait tout autant. Comme la pictura numérique, certains films numériques concernent l’effectuation ou la transformation d’images saisies auxquelles s’ajoutent des incrustations, par exemple. Lev Manovich fait état des étapes nécessaires à la fabrication de certaines de ces images numériques : « Les séquences en prises de vues réelles [que nous aurions qualifiées de « saisies »6] ne procurent plus qu’un matériau brut devant être manipulé à la main, animé, construit, combiné avec des scènes 3D créées par ordinateur et traité à l’aide de logiciels de dessin artistique » (2010, 519). Inutile de calculer le nombre de modifications que les images argentique ou numérique subissent avant de devenir film, car, en la matière, l’image est redevable de la représentation qui la fait-être à partir d’un support, d’une interface. Elle l’a été de tout temps. Avant qu’on la qualifie de numérique, la pictura s’était déjà glissée sous le tupos argentique au moment où Trauner, célèbre scénographe, peignait des fausses perspectives ou utilisait des tulles pour suggérer la fin d’une rue ou le début d’une autre pour les films de Carné. Autrement dit, les effets spéciaux ont ceci de « spécial » qu’ils peuvent être de tout ordre et tout à la fois scénographique, optique, mécanique, numérique.
Les saisies effectuées à l’aide d’une caméra numérique ne fournissent pas seulement un matériau brut, mais une intentionnalité, un penser, voire une conscience d’images. Le récent film d’animation Loving Vincent constitue un bon exemple d’un matériau qui ne serait pas brut, car il (r)emploie des toiles du peintre Vincent Van Gogh pour les animer.
Le procédé est le suivant :
« La technique PAWS (Painted Animation Work Station) que nous utilisons consiste à projeter des scènes tournées avec des acteurs pour les faire peindre au pinceau sur toile par des peintres », explique un jeune graphiste, Bartosz Dluzewski. « Le film est ainsi converti en toile, l’image numérique est traduite en peinture. En gros, on joue à Van Gogh et on devient Van Gogh, tout en utilisant des méthodes numériques de pointe », dit-il en souriant. « On fait des copies fidèles des tableaux du maître, mais souvent pour les besoins du film, il faut les adapter, les modifier ou [les] agrandir, en rajoutant des éléments qui ne figurent pas sur les originaux », explique Marlena Jopyk-Misiak, chargée de superviser le travail des peintres à Gdansk (Paulet 2016).
Ajoutons à ces considérations le fait que la pictura numérique ou l’image de synthèse ne nous a pas débarrassés de la réalité, car celle-ci fait retour sitôt qu’elle est convoitée7. D’une manière ou d’une autre, le faire-être-réaliste continue de constituer une possibilité de l’image, de la pictura numérique (et de la peinture).
Bien qu’elles puissent sembler très réalistes, et aussi réalistes que des images qui auraient été obtenues par empreintes photoniques, plusieurs images produites à l’aide de l’ordinateur n’en continuent pas moins d’afficher leur « donner » (ce sont des images qui, se présentant comme des images, persistent à se rappeler à une réalité) ou leur « penser » (ce sont des images qui, frayant plus ou moins avec l’abstraction ou pas du tout, sont issues de la pensée plutôt que de n’être, ainsi que nous l’avons longtemps cru — et à tort —, qu’un matériau brut, un résidu matériel de la réalité obtenu à l’aide d’un appareil capable, par exemple, de saisir ou d’imprimer puis de transporter des empreintes).
En tant qu’eikōn, toutefois, la pictura numérique, l’image de synthèse ou l’image obtenue à l’aide d’opérations de saisie puis d’incrustations, ne peut plus être im-média-tement associée à la copie. Rappelons que le spectateur a délaissé sa connaissance de l’arché photonique ou photo-cinématographique depuis que les images sont le fruit de technologies numériques ou depuis qu’il ne se satisfait plus de penser qu’il s’agit d’empreintes, de simples empreintes.
Le recours à la pensée de Jean Housen semble opportun, au moment où il identifie les « […] quatre attitudes extrêmes [de l’espace pictural et de l’espace filmique] (imitation illusionniste, expressivité subjective, opticité et formalisme). En effet une étude des modes de représentation de l’espace, si elle doit tenir compte de l’interaction de ces quatre facteurs (qui expriment chacun un point de vue juste mais partiel), ne peut négliger l’essentiel, à savoir l’espace imaginaire né de leur conjugaison » (Housen 1983, 3).
Ces attitudes ont l’avantage de permettre d’identifier les façons d’offrir êtres et choses à la représentation et de penser aux imaginaires qui y travaillent et les reçoivent. Comme il en était question à propos du tupos et de l’eikōn, que nous avons examinés en les tenant sur des voies séparées, nous chercherons moins la conjugaison de ces quatre attitudes (dont Housen fait la promotion parce que ces dernières décrivent, pourrait-on dire, une certaine ontologie de l’image) que (de manière faussement académique sans doute) des « classes » d’images. Supposons ainsi qu’une pictura (une peinture dans ce cas-ci) peut être hyperréaliste (imitation illusionniste) et qu’une photographie peut être très abstraite (expressivité subjective et opticité). Si la première semble s’accorder à un tupos ou correspondre à une empreinte photographique, la seconde, la photographie abstraite, pourra être associée à la pictura. La « trace écrite sur un support matériel » ou la trace écrite et son support matériel, de même que les technologies dont ils dépendent ne sont évidemment pas garantes des représentances et lieutenances. Ces dernières comptent, rappelons-le, sur la représentation avec, en plus, une intentionnalité fondatrice, un « penser ». Bien qu’ils aient l’importance que nous leur reconnaissons, les supports ne forment pas, à eux seuls, les desseins des images.
Toujours à propos de la représentance
À titre d’exemple, nous aimerions associer le personnage publicitaire de « la vache qui rit », qui a servi d’exemple à la mise en abyme infinie8, à celui de « la vache de synthèse »9. Dans le premier cas, la mise en abyme s’explique aisément puisque les pendants d’oreilles de la vache répètent l’image initiale, c’est-à-dire celle qui est représentée sur le contenant du célèbre fromage.
Par cette comparaison, nous souhaitons mettre en évidence cette idée : si la vache qui rit se présente comme un dessin, une pictura, la vache de synthèse affiche les deux cas d’espèce : la saisie du paysage accueille, en effet, une pictura numérique. L’image tend ainsi, imparfaitement, à se rappeler à la connaissance de l’arché (numérique lorsqu’on le réalise) ou à celle, dont nous avons dit qu’elle est plus impressionnelle, qui s’accorde aux technologies numériques.
La vache de synthèse10, qui a un caractère cinématographique plutôt que pictural, a été soumise à transformation par superposition des deux couches d’image. L’inclusion ou l’incrustation de la vache qui se bat s’oppose plus ou moins à l’aspect réaliste de la première couche d’image, celle du paysage. Aux accommodation, harmonisation, ajustement et changement effectués à partir de la saisie s’ajoute la transformation des images du film par incrustations et mouvements, incrustations de mouvements.
L’écriture
En toutes circonstances, la production de la pictura numérique ou la fabrication d’un dessin ne dépendent pas uniquement d’une perception virtuellement mobilisée par un corps, celui de l’infographe ou du dessinateur, car le point de vue est visiblement construit, re-produit. Il est ainsi toujours possible de décider de l’endroit où loger le point de vue dans l’image, d’en (pré)voir l’aiguillon que le lecteur identifie aisément sitôt qu’il a affaire à la perspective.
Schématiquement, ce prêt du corps à l’image, le point de vue ou l’aiguillon dont il découle, se présente ainsi, comme l’illustre le schéma qui suit11.
Nous apprécions, ici, le fait que l’aiguillon de la perception provienne de l’extérieur de l’image avant d’y basculer, d’y être refigurée. Plus important encore, ce schéma aide à comprendre un mouvement inverse, soit la disparition de ce corps au moment de la réception de l’image. Ce schéma permet, au surplus, d’envisager l’abolition de la perspective dans l’image. Disparition du corps et abolition de la perspective sont aussi bien le fait du tupos (un plan très rapproché le ferait) que de la pictura (un refus de figuration plus ou moins réaliste le ferait également). Lorsque Merleau-Ponty discutait de l’« espace sans cachette », de l’espace dépourvu de perspective, il notait ce qui suit :
L’espace est en soi, ou plutôt il est l’en soi par excellence, sa définition est d’être en soi. Chaque point de l’espace est et est pensé là où il est, l’un ici, l’autre là, l’espace est l’évidence du où. Orientation, polarité, enveloppement sont en lui des phénomènes dérivés, liés à ma présence (1964, pp. 28-29).
Mais l’espace pictural peut s’apparaître comme en soi. Ne s’offrant plus à la répétabilité (toujours approximative) de parts de réalité, il peut être, pour lui-même, authentiquement destiné à l’apparition. L’histoire de la peinture nous a montré que la ligne instituée entre le foyer et la cible, nécessaire à l’établissement de la perspective, est effaçable, délogeable. Cela s’est également avéré au cinéma et, en particulier, dans certains films associés au style expérimental.
En se défaisant de la perspectiva artificialis, nous n’avons pas perdu pour autant l’ontologie de l’image ainsi que Merleau-Ponty en fait la démonstration ; de même, nous ne nous sommes pas départis de l’ontologie du cinéma en nous défaisant de l’empreinte argentique. La saisie (le cadrage, la mise en plan, etc.) — à quoi concourait l’empreinte photonique — n’est pas davantage disparue. Notons, par ailleurs, que la pictura numérique, l’image de synthèse dans ce cas-ci, ne saurait faire l’économie de traits mimétiques, même très sommaires ou totalement approximatifs, qui se rappellent à une réalité. Insistons sur le fait que ces traits, indexés dans et par l’image, peuvent l’être grâce à la saisie (le cadrage, la mise en plan, etc.) et aux transformations à laquelle elle est soumise par la suite.
Reprenant les mots de Merleau-Ponty, on dira, à propos de la pictura numérique ou de l’image de synthèse, que « [l]e peintre [continue d’]“apporte[r] son corps”, [comme le] dit Valéry. [...] Pour comprendre ce[tte] transsubstantiatio[n], poursuit Merleau-Ponty, il faut retrouver le corps opérant et actuel, celui qui n’est pas un morceau d’espace, un faisceau de fonctions, qui est un entrelacs de vision et de mouvement » (Merleau-Ponty 1964, 12, nous soulignons).
Conclusion
Au terme de cette exploration, nous aurons compris que ce qui compte, ce n’est pas l’exacte reproductibilité des faits dans le contexte des récits historiques, mais le travail de représentance et de lieutenance en vertu duquel ils sont visés. La réalité de l’Histoire dépend, en la matière, des traces, du discours de l’historien, de l’écriture. L’étude de l’image tire profit de cette approche de l’écriture de l’Histoire. Cherchant à nuancer certaines acceptions associées à l’image, nous avons convenu que ce n’est pas le report de la réalité ou le capital de ses empreintes qui garantit l’ontologie du cinéma ou, en leur absence, sa nouveauté, mais le fait que le cinéma s’offre à la pensée ou que, ancien ou nouveau, il ait le caractère du « penser ». Dans le domaine de la peinture (de la pictura), sa réalité, qui a longtemps été liée au report de la perspectiva artificialis, n’est pas disparue au moment où nous nous sommes défaits de cette dernière. Au contraire, la réalité de l’image est apparue pour elle-même ou a été désignée comme un espace de la vision, du mouvement, de l’apparaissant au moment où elle n’a plus été mobilisée. Ce sont elles, les pensées im-matérielles, qui, de quelque façon qu’on réfléchisse au cinéma, refont surface. Elles traversent par ailleurs l’Histoire et participent d’un imaginaire de l’écriture, fut-elle assortie au tupos ou à la pictura numérique.
Bibliographie
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Nous pensons ici, en particulier, à l’ouvrage d’André Gaudreault et Philippe Marion qui a pour titre La fin du cinéma ? Un média en crise à l’ère du numérique (2013).↩
Nous revenons encore sur cette idée, car le sujet n’a pas été épuisé. Dans les autres textes dont nous sommes la signataire, cette idée de l’empreinte concernait les images matérialisées. Nous nous étions attachée à l’examen de la trace écrite sur un support matériel. Cette fois, le propos s’ouvre sur la problématique de l’Histoire, sur laquelle Ricœur s’est penché au moment d’écrire le passage cité plus haut. La suite de la citation est la suivante : « Nous avons atteint avec la problématique de l’empreinte et celle du rapport entre eikōn et empreinte le point ultime de toute analyse régressive. Or l’hypothèse — ou mieux l’admission — de l’empreinte a suscité au cours de l’histoire des idées un cortège de difficultés qui n’ont cessé d’accabler non seulement la théorie de la mémoire mais celle de l’histoire, sous un autre nom, celui de “trace”. L’histoire, selon Marc Bloch, se voudra science de traces. » (Ricœur 2000a, 15)↩
« […] la représentation littéraire ou scripturaire devra se laisser épeler en dernière instance comme représentance, la variation terminologique proposée mettant l’accent non seulement sur le caractère actif de l’opération historique, mais sur la visée intentionnelle qui fait de l’histoire l’héritière savante de la mémoire et de son aporie fondatrice. » (Ricœur 2000b, 304)↩
« […] Jay David Bolter et Richard Grusin définissent le medium comme “ce qui remédie” […] » (Manovich 2010, 193)↩
« Dans sa définition la plus générale, l’empreinte est une trace qu’un corps physique imprime sur ou dans un autre corps physique. Selon la manière dont la trace est réalisée, on peut distinguer les empreintes par contact direct et les empreintes à distance. Les premières sont l’effet d’une action mécanique ou chimique directe de l’imprégnant sur le corps empreint : c’est le cas de la gravure, de la frappe des monnaies ou du masque de mort. » (Schæffer 1987, 16)↩
Selon l’auteur, les étapes seraient les suivantes : « Film numérique = matériau tourné en vues directes + peinture + traitement des images + composition + animation 2D par ordinateur + animation 3D par ordinateur. »↩
Incidemment, bien qu’il s’agisse d’un film d’animation qui célèbre le travail pictural de Van Gogh, il y a des moments présumés de retour à la réalité lorsque les toiles se présentent en noir et blanc. Elles évoquent, par là, un certain passé.↩
Notre fille, Jeanne-Marie Roy, nous en a fait part alors qu’elle avait un petit quatre ans. Jean-Marc Limoges a largement développé les concepts de réflexivité et de mise en abyme dans sa thèse de doctorat. Elle a pour titre Entre la croyance et le trouble : essai sur la mise en abyme et la réflexivité depuis la littérature jusqu’au cinéma.↩
Celle-ci est extraite du film Kung Pow! Enter the Fist (Steve Oedekerk, 2002). On la trouvera à cette adresse : https://www.youtube.com/watch?v=LxXjsQbCZR8↩
« L’espace plastique et l’espace filmique ont en commun d’être le fruit d’une certaine convergence entre les données du référent (l’espace avec son organisation, ses ruptures, ses continuités), la subjectivité de l’artiste (qui privilégie tel ou tel aspect), les données de notre perception (qui distribue spontanément grandeurs et volumes en fonction du chromatisme et des effets de perspective) et l’organisation formelle : à partir de ces quatre éléments, l’un et l’autre inventent l’espace. La représentation figurative de l’espace (qu’elle soit plastique ou filmique) ne reproduit pas le visible, mais elle le crée. » (Housen 1983, 3)↩
L’image provient de l’Encyclopédie Larousse, dessin de Laurent Blondel, Archives Larousse [en ligne] : https://www.larousse.fr/encyclopedie/images/Perspective_centrale/1012353↩