« Das alles duldet ihr, weil euch Schurken sagen : diese Regierung sei von Gott ». Georg Büchner, Der Hessische Landbote. 1 »
« Tout cela vous le supportez parce que les crapules vous disent : c’est le gouvernement de Dieu ».
Georg Büchner, Le Messager hessois
Les questions entrecroisées de l’auteur, du texte et du jeu, de la fonction sociale de l’artiste (histrion ou éducateur), du metteur en scène et de la création collective, de la formation des comédiens et des publics, du chef choisi par les comédiens ou par l’état sont des questions qui génèrent autant de pratiques participant de l’identité des troupes et modifiant leur fonctionnement, leur image et leur action. Ces questions, toujours problématisées à des fins louables (servir le Théâtre, éduquer le public), marquent le paysage théâtral sans que l’on puisse en saisir clairement ni immédiatement les enjeux et les conséquences. Je m’intéresserai ici au chef de troupe. J’ai décidé de travailler sur cette notion à partir du point de vue incisif d’Alain : « Je ne dis pas seulement que je n’ai aucune confiance dans aucun genre de chef, ce serait trop peu dire. Au fond, je suis assuré que tout chef sera un détestable tyran si on le laisse faire 2 ». C’est dire que la question du chef est d‘emblée mise en résonance avec celle de la responsabilité collective du groupe. Elle sera au 19e puis au 20e siècle un objet d’étude pour la philosophie 3 et plus largement pour les sciences humaines et sociales, notamment la psychanalyse 4 . Mais à ma connaissance, la question du chef de troupe dans le champ du théâtre n’a jamais été abordée de front.
Selon le Petit Robert 5 , le mot « chef » est « issu du latin, caput, capitis, tête (d’homme, d’animal), au sens figuré d‘extrémité, pointe, d’où, personnage principal, chef ». Le chef est le personnage capital, celui qui, à la tête du groupe, pense. S’il est la tête, les autres sont les membres, exécutants. Ceci étant dit, comment peut-on aborder cette question dans le champ du Théâtre ? Qu’est-ce qui n’est pas dit, peu pensé ou évacué sur ce phénomène ? Comment mettre les mots au travail pour en révéler, non seulement la polysémie, mais corollairement les arêtes et épines là où souvent on n’est sensible au premier abord qu’à la beauté de la chose ? Qu’est-ce qu’un chef de troupe au Théâtre ? Cette figure illustrée par de grands hommes – à commencer par Molière- disparaît pour réapparaître régulièrement et semble à nouveau, comme dans la première moitié du 20e siècle, bénéficier d’un terrain favorable à sa pérennité quoique sous des vocables différents. Quelles nécessités légitiment l’existence d’un chef ? Sont-ce ses compétences, qu’il utilise pour réaliser sa vision du théâtre, qui le conduisent à assumer cette fonction ? Ou se consacre-t-il à la tâche de faire advenir les potentialités créatrices de la troupe ? Est-il l’émanation du groupe, délégué par ce dernier pour remplir certaines fonctions ? Est-il extérieur au groupe, occupant une place symbolique particulière ?
Les communications de notre journée d’études font état de diverses possibilités : le Maître (Jouvet), le Gourou (Roy Hart Theater), le Tyran (« premier » Théâtre Populaire Romand), le Délégué (« deuxième » Théâtre Populaire Romand), le Garant d’une éthique communautaire (Teatr Ósmego Dnia), ou l’organisateur (Les Tréteaux d’Artois). Autant d’expériences, autant de figures de la fonction (se juxtaposant souvent à celle du metteur en scène), mais le fait est là, le chef, quel que soit le nom qu’on lui prête, semble être indissociable de l’existence d’une troupe. Les articles les plus récents sur la notion de troupe et l’évolution de ce mode de pratique théâtrale renforcent l’impression qu’il y a, à l’endroit de cette question, quelque chose qui a des difficultés à se penser. Le mot « chef », un peu désuet et à connotation péjorative est remplacé par des périphrases (à défaut d’un terme plus juste ?). Certains articles 6 font état de « responsable de la gestion idéologique », de « personnalités suffisamment fortes », de « maître de plateau » de « maître d’œuvre », d’une « personnalité directrice, inspiratrice, fédératrice », de « pivot central ». Autant de détours pour désigner sans la nommer, une position potentiellement problématique. D’autres 7 évoquent a posteriori leur « propre obstination tyrannique » ou leur tentative d’expérience communautaire, expression d’un « être ensemble » fondateur pour la troupe ou la compagnie. La question du chef et ce qu’elle met au travail est entre toutes les lignes, à défaut d’être dans toutes les bouches ou sous toutes les plumes.
Le chef est seul. Quel que soit le chemin qui l‘a conduit à cette place, c’est quelqu’un dont dépend le groupe et qui le marque par sa personnalité. « Le chef est celui qui conduit la communauté. Il est là pour le bien de tous », dit Lacan, au sujet de Créon dans son analyse d’Antigone 8 . Dans tous les cas, il est seul, sans être plus libre que les individus du groupe. Seul, il porte le poids de la responsabilité de l’œuvre à faire advenir. En dernière instance, c’est son nom qui sera gardé dans la mémoire collective. Freud insiste sur l’idée que l’œuvre personnelle du poète ou du penseur peut devoir beaucoup à son environnement social et qu’il est peut-être seulement celui qui, par son œuvre, donne forme à un travail auquel la masse a participé. De même au théâtre, s’il est seul et seule figure visible, le chef de troupe n’en est pas moins l’expression d’un groupe, d’une masse qui se reconnaît dans son œuvre ou espère s’y reconnaître et pour cela l’acclame.
Pour Freud, une masse primaire, (avec un meneur et sans excès d’organisation) « est un certain nombre d’individus qui ont mis un seul et même objet à la place de leur idéal du moi et se sont, en conséquence, identifiés les uns avec les autres dans leur moi. 9 » (« Eine solche primäre Masse ist eine Anzahl von Individuen, die ein und dasselbe objekt an die Stelle ihres Ichideals gesetzt und sich infolgedessen in ihrem ich miteinander identifiziert haben. 10 »). La notion de masse n’implique pas obligatoirement un grand nombre de personnes, il suffit d’être deux pour que des effets de masse soient observables. La définition semble pouvoir s‘appliquer à la troupe, si on pose comme idéal commun une conception du théâtre, ce que confirme le débat organisé pour les Cahiers de la Comédie-Française en 1993-1994 : « former une troupe, c’est se réunir autour d’un même idéal artistique et en venir à bout. 11 » Dans une troupe, l’esprit communautaire unit les membres entre eux sous la tutelle du chef :
« l’exigence d’égalité de la masse vaut seulement pour ses individus, non pour le meneur. Tous les individus doivent être égaux entre eux, mais tous veulent être dominés par un seul. Beaucoup d’égaux qui peuvent s’identifier les uns avec les autres et un seul unique, supérieur à eux tous, telle est la situation que nous trouvons effectivement réalisée dans la masse viable. 12 »
(« Nun vergessen wir aber nicht, daβ die Gleichheitsforderung der Masse nur für die einzelnen derselben, nicht für den Führer gilt. Alle einzelnen sollen einander gleich sein, aber alle wollen sie von einem beherrscht werden. 13 »).
Freud, après Nietzsche qui distinguait la « morale des maîtres » de la « morale des esclaves 14 », définit deux types de psychologie, celle du chef 15 , libre et autonome et celle des membres de la troupe qui, ensemble, le suivent.
Suivre un meneur, quand l’individu est en accord avec lui, paraît compréhensible, voire normal, du moins courant et dans tous les cas, reposant. Il faut aussi pointer la responsabilité de ceux qui, de conserve, laissent les chefs qu’ils se donnent prendre des décisions contestables. Ainsi, on a pu reprocher à Copeau son attitude vis-à-vis des comédiens juifs 16 qu’il évitait de distribuer puis qui ont « choisi » de quitter la troupe de la Comédie-Française, sous l’occupation allemande pendant la deuxième guerre mondiale. Or, personne dans la Troupe n‘a protesté assez fort pour qu’il en reste des traces aujourd’hui. Laisser faire un chef signifie soit l’adhésion à son acte 17 soit le renoncement à tout jugement personnel, attitude potentiellement suicidaire, sur laquelle Alain ironise en pointant que le berger en qui le mouton a confiance est celui qui élève et protège son troupeau pour le conduire à l’abattoir 18 . Provocatrice, cette comparaison n’en est pas moins évocatrice et pousse à la réflexion si on la place sur le terrain de la pensée. En effet, renoncer à penser pour se soumettre à la raison du chef, qui tient lieu en quelque sorte de sur-moi, équivaut à renoncer à être ce sujet qu’on pourrait être. Dans le champ théâtral qui nous concerne ici, la notion de chef sous-entend une fonction légitimée par une autorité regroupant une responsabilité (artistique, mais aussi administrative, politique et économique) et un pouvoir, parfois implacable. En outre elle implique en réponse une soumission plus ou moins totale, mais, pour une raison noble s’il en est puisqu’il s’agit du Théâtre. Le choix de la soumission est aussi nécessaire que celui du commandement pour qu’il y ait chef. Cela peut être un choix délibéré, car, parfois, ainsi que le remarque Bion, c’est le groupe lui-même qui manifeste le besoin d’un leader ayant l’autorité nécessaire pour conduire le groupe à la satisfaction des besoins qui le constituent et que chacun des membres ne peut, seul, atteindre 19 .
Ce besoin est alors exprimé, voire érigé en exigence ou ultimatum par la troupe, comme Bernard Faivre en témoigne à propos du Théâtre de l’aquarium. En effet, en 1980, « le groupe (du Théâtre de L’Aquarium ) ‘intime’ à Jacques Nichet d’assumer pleinement la direction du spectacle. Il s’exécute, produit une pièce étrange et belle, mais où le public ne reconnaît plus ‘son’ Aquarium ». Cette expérience a été le premier signe de la mort de ce collectif 20 . Elle pose aussi plusieurs questions : est-il possible, (mais, est-ce nécessaire et jusqu’à quel point ?) de penser sa pratique théâtrale, son esthétique de manière personnelle dans une troupe ? Ne suffit-il pas que le chef assume la pensée esthétique de la troupe, son pouvoir se construisant sur son savoir supposé ? ou sur de nouvelles valeurs esthétiques créées par lui ? le suivre c’est adhérer à ses valeurs. Ayant trouvé sa vérité, il l’érige en vérité universelle en dehors de laquelle « point de salut ». La troupe conduit-elle à la dépersonnalisation ou à l’adhésion inconditionnelle à la pensée du chef, ou bien, est-elle structurante et de quelle manière ? Permet-elle, et jusqu’à quel point, une liberté de jugement ? Les caractéristiques observées sur les masses, « disparition de la personnalité individuelle consciente, l’orientation des pensées et des sentiments dans les mêmes directions, la prédominance de l’affectivité et de l’animique inconscient, la tendance à l’exécution non différée d’intentions émergentes 21 » conduisent Freud à parler d’un « état de régression à une activité d’âme primitive », (« der Schwund der bewussten Einzelpersönlichkeit, die Orientierung von Gedanken und Gefühlen nach gleichen richtungen, die Vorherrschaft der Affektivität und des unbewussten Seelischen, die tendenz zur unverzüglichen Ausführung auftauchender Absichten“ -, das alles entspricht einem Zustand von Regression zu einer primitiven Seelentâtigkeit 22 . ») Cette régression étant toutefois empêchée dans les masses « hautement organisées » et dont les règles portées par le chef assurent à l’ensemble une cohésion. Les troupes théâtrales qui perdurent en sont une bonne illustration.
Mais comment s’organise cette cohésion ? N’est-elle pas un signe avant-coureur d’une forme de totalitarisme ? Qu’en est-il de la pensée, là où les personnes sont soumises à un devoir d’obéissance au chef (quand bien même ce serait pour la bonne cause), là où elles ont « besoin d’un maître, d’un chef autant que de leur pain quotidien 23 » ? Face à un chef l’alternative est parfois bien mince comme le souligne Kevin Crawford qui cite Roy Hart « ou vous êtes avec moi ou vous êtes contre moi 24 ».
L’idée que je cherche à développer n’est pas que toute direction doive être supprimée, car au théâtre, le spectacle à réaliser en nécessite bien une, tout comme il exige des décisions et leur respect 25 . Mais, cette fonction ne va pas de soi, même si elle est rarement discutée pour ce qu’elle est et ce qu’elle produit. Pour l’intérêt commun, elle ne devrait jamais aller de soi et la question de la définition de ses limites devrait être posée. Dans le cas contraire, le risque du renoncement à la pensée surgit, surtout si le chef ne distingue pas entre la force et le droit, entre son désir et celui du groupe, et ce, d’autant plus que la troupe faisant corps avec lui, si son entreprise réussit, il est pardonné. Dans le monde actuel, la question n’est pas neutre, les « Gourous » sont charismatiques. Tout chef devrait être un peu malmené et non porté aux cieux comme cela semble être la coutume dans le champ du théâtre qui n’a pu, au 20e siècle, parler de ses chefs qu’à genoux.
Les modes de fonctionnement des groupes et leurs rapports au chef sont multiples et sont liés, non seulement à l’imaginaire produit par cette figure qui l’en nourrit en retour, mais aussi au mode d’attribution de la fonction. On distingue les chefs désignés par le groupe, ceux qui le sont par une instance extérieure (par décret, n’ayant donc pas eu à conquérir un pouvoir qui peut leur être retiré à tout instant), ceux qui conquièrent et gardent cette place par force ou persuasion mais aussi les postulants chefs qui créent leur troupe en en choisissant soigneusement les membres en fonction de leur projet esthétique. Par ailleurs, dans certains groupes, le rôle de chef est tenu par une idéologie commune 26 et non par une personne, comme en témoignent les expériences autour de la création collective des années 70 27 . Bien que des réflexions aient été engagées sur le thème de l’éthique du collectif 28 au théâtre, ces essais expérimentés par les troupes puis les collectivités créatrices, sont souvent voués à l’échec quelles qu’en soient les raisons, économiques, sociales ou de structure. 29
Ces problématiques sont donc connues, et pour ce qui concerne le théâtre, les différents cas de figure ont existé, y compris celui des troupes sans chef, et ce, dès le 17e siècle 30 . En effet, dans la seconde moitié du 16e siècle, en France, la place que le théâtre prend dans la société change radicalement et un nouveau corps, celui des comédiens tend à se professionnaliser et se libère ainsi petit à petit du joug de l’église distinguant ainsi l’engagement spirituel de l’engagement matériel nécessaire à la réalisation du théâtre. Ce faisant, cette nouvelle catégorie sociale devient dépendante du développement de la valeur marchande de son travail pour survivre. On passe progressivement de la fête religieuse (les Mystères), c’est-à-dire du théâtre participatif, expression d’une communauté, ou du théâtre éducatif des jésuites à un théâtre de divertissement pour lequel le noble, puis le bourgeois va s’habituer à payer, en renonçant à jouer pour devenir spectateur. D’un point de vue structurel, on peut déjà considérer qu’on change de chef : ce n’est plus Dieu, mais l’économie qui devient le moteur du théâtre, car pour exister en tant que pratique dégagée de l’Église le théâtre doit trouver des protections (que le roi ou les nobles accorderont, contribuant ainsi à créer d’autres types de liens et un autre théâtre) et de l’argent. Les comédiens professionnels commencent à s‘associer en groupes réguliers et itinérants (qui ne s’appellent pas encore Troupes ). Généralement, ils oeuvrent sous la conduite d’un patron , d’un directeur 31 ou d’un procureur général 32 qui a la responsabilité financière de l’entreprise et les recrute pour la saison (le plus souvent pour un an à partir du début du carême). Dicté par la nécessité de survie, le fonctionnement de ces groupes est parfois garanti par un contrat écrit et signé devant notaire, « les comédiens discutaient leurs salaires avec âpreté, posant clairement les conditions d’engagement et de paiement 33 . » Le contrat définit la nature de l’engagement de chacun des membres en même temps que ses limites : on ne donne pas son âme comme en religion, mais on s’engage pour un travail défini et sur une durée déterminée.
À l’époque, cet arrangement est un gain de liberté. Plusieurs de ces contrats retrouvés permettent de distinguer, d’une part, l’existence de troupes engagées et payées par un chef (notamment à la fin du 16e siècle), mais aussi (surtout au début du 17e siècle) des modes d’organisation plus démocratique, plus courante et « où chacun, directement intéressé au succès, recevait sa part des recettes 34 » ce dont témoigne L’Illusion comique de Corneille. En 1674 dans Le Théâtre français , Chappuzeau consacre plusieurs pages à la description du fonctionnement interne du monde des comédiens.
« Leur gouvernement, comme celui de toutes les sociétés, est une manière de république fondée sur des lois d’autant plus injustes qu’elles ont pour but le bien public, de divertir et d’instruire. »
Ces sociétés « ne veulent point de maître particulier et l’ombre seule leur en feroit peur 35 ». « Ils n’admettent point de supérieur, le nom seul les blesse ; ils veulent tous être égaux et se nomment camarades » 36 . Ce fonctionnement n’est pas pour autant exactement démocratique (disons qu’il est accepté démocratiquement) puisqu’il repose sur « l’inégalité dans le mérite » et ceux qui rendent peu de services à l’état n’ont pas les mêmes avantages que ceux qui en rendent beaucoup. Les femmes ont une voix délibérative « en toutes les affaires qui regardent l’intérêt commun », ce qui, au regard de l’époque est à noter comme une position très avant-gardiste. Dans cette organisation dite « républicaine », une fonction se détache parfois qu’on peut rapprocher de celle du chef, mis à part le fait qu’il ne doit sa fonction « qu’au pur hasard » et qu’il n’a pas plus de pouvoir que les autres. Il s’agit de l’orateur qui a la responsabilité de faire la harangue et de composer l’affiche et parfois de régler l’organisation du travail. Mais il n’est pas payé pour cela ; la troupe « se repose sur ses soins, elle luy confie ses intérêts, et il trouve de son costé de la gloire à le servir, ce qui luy tient lieu de récompense » 37 . Scarron dans son Roman comique dépeint une Troupe de ce type dans laquelle le personnage de Destin (gentilhomme pauvre et déclassé) a cette fonction d’orateur et tient les premiers rôles dans les spectacles que monte la Troupe.
Pour ce qui concerne les troupes avec chef, la question du débat autour du pouvoir et de l’autorité est illustrée de belle manière par l’Impromptu de Versailles . Molière y met en scène la manière de résister à un chef, de le contester et de le conduire à revenir sur ses positions et sur ses décisions, et donc à évoluer. Il le fait, de plus, pour le regard du Roi, mettant « en scène tous les rapports possibles entre un être tout-puissant – le roi spectateur – et une pièce qui met en scène la figure monarchique 38 ». Mais, il ne se contente pas de mettre en scène la question de l’autorité suprême, il la travaille via le personnage du chef de troupe. En effet, au discours sur le théâtre qu’il tient dans ce texte, s’ajoute la présentation d’une manière de travailler dans la troupe qui nous est révélée par les multiples interruptions de la scène enchâssée et par les discussions de la scène cadre. Ces discussions entre les comédiens et le Directeur témoignent de leur respect réciproque ainsi que de leur grande complicité : car, comment sinon (note le commentateur de l’édition de La Pléiade), Molière et sa femme auraient-il pu jouer leur scène de ménage ? Cette scène souligne l’importance des rapports affectifs dans une troupe. Elle donne un aperçu des conflits potentiels opposant les membres à leur chef et du mode de résolution inventé pour les résoudre. En effet, devant les réticences vives et l’opposition active des comédiens pour jouer cet impromptu « Molière Directeur de Troupe » n’a, pour les convaincre, que le pouvoir qu’il exerce sur eux, résultant des expériences positives passées. Pour chaque conflit l’opposant à ses comédiens, il se montre rassurant, sécurisant, patient, confiant et optimiste, jusqu’au moment où il doit céder et accepter d’aller annoncer au Roi leur impossibilité de jouer, ce qui est la pire situation qui puisse se produire dans une troupe avant un spectacle. Cela peut en dire long sur les rapports au sein de la troupe 39 . Mais, en abordant le rapport entre le directeur de troupe et ses comédiens, Molière traite de façon plus large la question du droit à disputer l’autorité du chef pour le bien public. Mettre en scène un chef, au moment où perce le risque que son autorité se fissure et où le groupe ose lui dire « nous ne sommes pas d’accord, tu te trompes » est dans tous les cas assez remarquable, surtout quand on s’adresse au Roi.
Au cours du 18e et surtout du 19e siècle, le capitalisme se développe. L’esprit d’entreprise modifie le mode de travail théâtral 40 favorisant le vedettariat, vénérant les monstres sacrés. En province, les directeurs de troupe n’hésitent pas à faire appel à des personnalités parisiennes (Dorval, Dézajet, Melle Duchesnois). Les comédiens ne forment plus un corps collectif, le projet artistique ne leur appartient plus ni les moyens de décision. L’esprit « de troupe » tend à disparaître chez les professionnels (mais pas dans le théâtre amateur 41 ). Cela sera en partie à l’origine des réformes esthétiques élaborées dans toute l’Europe dès la fin du 19e siècle, et notamment en Allemagne qui voit apparaître la première troupe moderne, celle des Meiningen :
« la troupe se présente comme un groupe compact, presque comme un corps multiple qui occupe et dynamise le cadre scénique avec des mouvements apparemment spontanés, mais minutieusement réglés et exécutés 42 ».
Le 20e siècle n’a cessé de poser des questions de rénovation théâtrale en s’appuyant sur une idée de la troupe, car la rénovation du théâtre, art collectif, ne peut se faire en solitaire. En France, Antoine, puis Copeau, Jouvet, Dullin, (pour ne citer qu’eux) tentent d’élaborer une nouvelle éthique de la profession au service d’un idéal artistique et parfois démocratique ou du moins éducatif du théâtre. Les rénovateurs travaillent ainsi en rassemblant autour d’eux des compagnons dont ils prennent la direction, revendiquant la nécessaire autorité d’un chef, utilisant parfois un vocabulaire teinté d’esprit religieux.
« Il importe écrivait Copeau, de faire un pacte avec son âme. Et de s’y tenir loyalement. Ne souriez pas trop de la gravité de mes paroles. Tout est aujourd’hui d’une gravité exceptionnelle, implacable. Vous n’avez pas à choisir [je souligne]. Il faut que chacun de vous dans le secret de son âme, soit un héros. Je dirais même si je ne craignais d’être mal compris, et je le dis à mi-voix et en confidence : un héros… et un saint pour lui-même. 43 »
Dictant ainsi leur devoir à ses ouailles, il fait appel à leur engagement, à leur sacrifice pour sa noble cause. Tout manquement à ses exigences comporte le risque d’être renié par le chef. Les mots percutants et les formules fortes ont raison de tout raisonnement :
« On les prononce avec recueillement devant les masses et aussitôt les mines deviennent respectueuses et les têtes s’inclinent 44 . »
(Man spricht sie mit Andacht vor den Massen aus, und sogleich werden die Mienen. Respektvoll, und die Köpfe neigen sich 45 . »)
Si, historiquement, nous l’évoquions plus haut, les contrats ont pu apparaître, comme un gain de liberté en garantissant aux individus un espace de liberté privée, ils pourraient devenir un frein pour l’entreprise commune dans ce nouveau contexte où l’individu, interpellé au niveau de son désir profond, est sommé de suivre la route tracée par son idéal personnifié, le chef. Il faut ainsi renoncer à cet espace de liberté privée pour se consacrer à l’œuvre commune dont la réussite dépend de l’engagement de chacun. Laurence Labrouche évoque des contrats implicites, non écrits, mais structurant le fonctionnement de la troupe du Théâtre du Soleil :
« l’engagement au Soleil n’est ratifié – et n’a jamais été ratifié- par aucun contrat écrit, signe que ce qu’il entérine dépasse le seul domaine professionnel, signe aussi que l’on conclut le pacte bien davantage avec soi-même qu’avec une compagnie. Ce que pose un contrat moral, c’est la liberté et la responsabilité absolue d’un sujet qui ne se trouve lié qu’à sa propre parole 46 ».
Ainsi, la contrainte est intériorisée par le sujet et au sein d’une troupe, le rapport « vie professionnelle/vie privée » se modifie puisqu’il est possible de faire de sa profession sa vie.
Pour vivre ce rêve, on se rassemble autour d’un chef qui permet de tenir l’illusion, mais qui, dans le même temps, et par le fait même qu’il se trouve en position de diriger l’une, interfère sur l’autre. La question de l’appartenance devient progressivement celle de l’appartenance à une Famille (choisie et non imposée) dans un 20e siècle qui a vu l’affaiblissement de cet appareil idéologique d’état et la crise de la fonction du Pater que la troupe semble rétablir de manière parfois caricaturale. Elle est importante pour plusieurs raisons. D’une part, elle favorise l’amalgame, aussi bien pour les individus de la troupe que pour le chef, de l’être et de la fonction, de la vie privée et de la vie professionnelle, de l’affectif et du jugement (ce qui conduit à accepter l’inacceptable, à ne pas exercer ses facultés de jugement), autant de confusions qui s’instituent progressivement comme un ordre des choses. D’autre part, elle perpétue l’idée qu’il y aurait des bons chefs dans le champ artistique, (notamment au Théâtre et au Cinéma), et des mauvais (d’état, d’armée ou d’entreprise) contre lesquels il serait légitime de se révolter. Car, on peut, et cela est généralement bien porté, se rebeller contre l’autorité de l’état, du Prince, mais le peut-on contre l’autorité du chef choisi, admiré et aimé ? En effet, la dimension de l’amour comme celle de l’admiration du chef est indéniable dans les troupes 47 . Pendant tout le 20e siècle, il est notoire que la question des affects au sein des troupes est abordée dans sa dimension câline, fascinante et exaltante, plutôt que dans ce qu’elle engendre comme limites 48 et renoncements. La conception de l’éthique sous-jacente serait à questionner et nous renvoie à un autre texte de Freud, Malaise dans la civilisation , dans lequel il situe l’éthique de la civilisation comme une tentative thérapeutique par le surmoi, et lui oppose la psychanalyse qui est une éthique anti-surmoi visant à permettre au sujet de persévérer dans son être 49 .
Quand plusieurs chefs s’associent pour défendre leurs intérêts professionnels ou moraux, peut naître un « Cartel ». Il est bien évident que ni Dullin, ni Jouvet, Pitoëff, ou Baty ne pouvait se soumettre aux autres membres du cartel 50 . Chacun avait besoin de son pré carré et de sa troupe pour expérimenter ses idées et faire progresser le théâtre de son point de vue. Quiconque est chef a besoin d’un instrument docile. Si la troupe naît du désir d’une personne, pour exister, elle doit rencontrer d’autres désirs, dont celui d’être gouverné par une autorité en qui l’on a mis sa confiance. On a donc pensé pour se soumettre, mais continue-t-on à penser lorsqu’on travaille avec Un Autre qui pense mieux, plus vite et dont l’œuvre est reconnue ? La fonction première du chef est de diriger ses troupes pour atteindre le but qu’il s’est défini. Copeau ne s’y trompait pas, qui imposait une discipline de fer, ainsi qu’un mode de vie plus qu’austère à ses acteurs (mais il n’est pas le seul et une de ses références est Meiningen). Il développe son idée de la troupe :
« le théâtre du vieux Colombier groupe à son tour, sous l’autorité d’un seul homme, une troupe de comédiens jeunes, désintéressés, enthousiastes dont l’ambition est de servir l’art auquel ils se consacrent. Nous aurons toujours en vue l’assouplissement des dons individuels et leur subordination à l’ensemble » 51 .
Son objectif est clairement formulé et sous-entend que ces jeunes comédiens adhèrent à sa conception pour travailler avec lui. Doivent-ils renoncer à leurs propres idées ? C’est ce que Copeau semble suggérer : « vous n’avez pas à choisir 52 ». Le seul choix possible est de suivre le chef. Cela confirme l’analyse que fait Freud évoquant l’individu de la masse qui abandonne son idéal du moi pour l’échanger contre l’idéal de masse incarné dans le meneur 53 . Car Copeau veut remodeler les comédiens (qu’il souhaite jeunes) par une formation dont il prend la responsabilité. En effet, quel autre moyen que l’école coupée de toute influence extérieure pour obtenir ce qu’on veut ? Et plus les élèves sont jeunes, plus facilement ils peuvent être formés suivant les nécessités de l’idéal du chef. Les chefs de troupe du 20e siècle ont créé, de diverses manières, leur école pour former les comédiens qu’ils souhaitaient pour leur projet esthétique. La question de l’école est ainsi posée. La réalité de la troupe de théâtre pousse le meneur à juxtaposer jusqu’à les faire se recouvrir, plusieurs rôles distincts : metteur en scène, maître d’école, directeurs de conscience, éventuellement pseudo psychanalyste, conduisant parfois les membres à gommer la frontière entre l’espace privé et l’espace professionnel. Autant de troupes, autant de doctrines, d’écoles et de fonctionnements 54 .
Le cas de Dullin est différent puisque, dirigeant l’atelier, son projet n’était pas de former les élèves en fonction de son projet esthétique, mais de les amener à développer toutes leurs potentialités créatrices comme préalable nécessaire pour changer le théâtre : « il défendait qu’on l’imitât. Il nous apprenait à être nous-mêmes. Refusant toutes les facilités qu’accorde avec le temps l’expérience, il s’amusait parfois en souriant à nous faire découvrir ce qui, en nous, bon ou mauvais, n’était qu’à nous-mêmes » expliquait Vilar 55 . La volonté d’accompagner ses élèves dans l’affirmation de leur être, démarche à l’opposé de celle de Copeau, est proche de la conception de l’éthique de la psychanalyse, « chercher à devenir ce qu’on est ». Dans sa thèse, Surel-Tupin, décrit ce « Patron » comme un grand pédagogue à l’écoute de toute proposition et attentif à tout essai de ses élèves auquel il attachait autant d’importance qu’à sa recherche propre : « je crois que personne ne détient la vérité absolue parce qu’il n’y a pas de vérité théâtrale absolue 56 ». Homme capable de reconnaître ses erreurs, il écrit : « je me suis souvent trompé et me tromperai encore ».
Plus proche de nous, Grotowski (dont l’expérience a eu une grande influence en France, notamment par ses cours au Collège de France) exigeait une ascèse quasi religieuse de ses comédiens. Il puisait ses références dans les rites des sociétés primitives pour « trouver des formes nouvelles, des stimulants non religieux qui soient aussi enracinés chez l’homme moderne que l’était la participation mystique chez les primitifs 57 ». Odette Aslan le compare à un « Gourou » qui, pour parvenir à ses fins, n’hésite pas à user d’une forme de violence qu’elle apparente au sado-masochisme 58 .
Pour éviter toute tentation polémique, je m’arrêterai à ces exemples historiques pensant qu’il est difficile de faire le bilan des projets, des intentions et des professions de foi actuels ou qui ne bénéficient pas d’assez de recul pour une analyse distanciée. Mais, je crois important de souligner la contradiction tapie dans ce fantasme produit par la question de la troupe. Elle s’est nouée au sein même de nombreuses troupes qui ont défendu (et défendent parfois encore) une conception idéalisée du Théâtre (que l’idéal soit esthétique, politique ou éducatif) étant prêtes pour cela à cautionner une dictature qui dit rarement son nom pour la bonne raison qu’elle s’ignore souvent elle-même, toute portée par son désir de faire le bien de tous, y compris malgré eux. Quand l’idéal est d’ordre esthétique, il n’y a aucune prétention à changer le monde ou à lui donner des leçons, on reste dans la contemplation et les fonctionnements des troupes ne sont le lieu d’aucun enjeu discuté. Quand, par contre, il est d’ordre militant, à vocation sociale, comme souvent dans la deuxième moitié du 20e siècle, la contradiction vaut d’être pointée. Peut-on défendre un discours à prétention démocratique ou progressiste par des procédés tyranniques ou mystificateurs ? Est-ce vraiment une perspective de désaliénation ? Que peut y gagner le Théâtre ? Il me semble que cette difficulté est structurelle et c’est à la mettre au travail que les expériences du 21e siècle s’emploieront peut-être, à condition de l’identifier, de la nommer car, si elle est souvent sous-jacente aux prises de position, elle n’est jamais clairement débusquée.
-
Georg BÜCHNER, Der Hessische Landbote, (1957), Universal-Bibliothek, Stuttgart, Philip Reclam jun. Gmbh & Co, 2002, p. 42. ↩
-
Alain, Propos sur le pouvoir , Paris, Gallimard, Essais folio, 2003, p. 33. ↩
-
Pour Nietzsche « La démocratisation de l’Europe est, en même temps, et sans qu’on le veuille, une école des tyrans, ce mot étant pris dans toutes ses acceptions, y compris la plus spirituelle », Friedrich Nietzsche, Par-delà bien et mal (1885), Textes et variantes établis par Giorgo Golli et mazzino Montinari, traduit de l’allemand par Cornélius Heim, Paris, Gallimard, Essais Folio, 2003, p. 162. ↩
-
À partir de la fin du 19e siècle, les questions de la psychologie des masses et des relations du chef avec le groupe ont fait coulé beaucoup d’encre de Le Bon à Freud, puis Bion et Lacan. Aujourd’hui, ce thème de recherche réapparaît dans le champ de la Philosophie et de la Psychanalyse, notamment à Paris X - Nanterre dans le cadre du séminaire de Doctorat « Psychanalyse et politique » dirigé par E. BALIBAR et B. OGILVIE (2004/2005). ↩
-
Paul ROBERT, Le Nouveau Petit Robert , Paris, Dictionnaires Le Robert, 2002, p. 415. ↩
-
Études Théâtrales , n°26, Louvain-la-Neuve, Centre d’études théâtrales de Louvain, Belgique, 2004, Jean-Louis BESSON, pp. 104 et 106, Bruno TACKELS, p. 110, Jacques DELCUVELLERIE, p. 140. ↩
-
Dominique SERRON, pose la question du désir du leader suscitant l’enthousiasme de ses compagnons, déformant le projet de troupe « par un trop plein d’intention », période suivie d’un renoncement « au concept de troupe », permettant « de ramener la création au centre de nos préoccupations », Études Théâtrales , n°26, p. 117, et Jean BOILLOT, p. 123. ↩
-
Jacques LACAN, L’éthique de la psychanalyse , Paris, Seuil, 1986, p. 300. ↩
-
Sigmund FREUD, Psychologie des masses et analyse du moi , Œuvres complètes, Tome XVI, 1921-1923, Publié avec le concours du Centre National du Livre, Paris, PUF,1991, p. 54. ↩
-
FREUD, Massenpsychologie und Ich-Analyse , Francfurt am Main, Fischer Taschebuch Verlag, 1993, p. 78. ↩
-
Ce débat réunissait Yves GASC, Noëlle GUIBERT, Alain LENGIET, Jean-Pierre MIQUEL, Jean-Loup RIVIERE et Terje SINDING ; il a été retranscrit dans Les Cahiers de la Comédie-Française , Revue trimestrielle de théâtre , n° 10 (numéro consacré à la troupe), Paris, POL, Hiver 1993-1994, pp. 86-95. ↩
-
FREUD, Psychologie des masses , p. 60. ↩
-
FREUD, Massenpsychologie , p. 83. ↩
-
NIETZSCHE, Par-delà bien et mal , p. 183. ↩
-
FREUD, Psychologie des masses , p. 63. ↩
-
« Il se rangea à la consigne gouvernementale : calmer le jeu en ne distribuant pas, je (Joubert) le cite "des juifs trop voyants" dans les premiers spectacles (carnet de COPEAU du 16 août 1940) ». Marie-Agnès JOUBERT, « L’exclusion des juifs », La Comédie-Française sous l’occupation , pp. 146-148. Il est toujours facile de se placer en moraliste, aussi, il n’est pas question ici d’accuser Copeau d’antisémitisme, mais de souligner que sa raison de vivre était toute tenue par le théâtre. Les questions de personnes, mais aussi d’éducation ou de politique n’étaient pas conscientisées chez lui, au point de le faire renoncer à son unique objectif, le Renouveau du théâtre. ↩
-
Pour BION, « Évidemment tout le monde éprouve quelques hésitations à insister ainsi sur la responsabilité collective. Cependant, je supposerai qu’un groupe est d’accord avec son chef à moins qu’il ne le désavoue ouvertement. En un mot, je considère comme entièrement légitime de dire qu’un groupe éprouve ceci ou cela – même lorsque seuls un ou deux membres semblent justifier cette constatation par leur comportement- si, au même moment, le groupe n’expose pas clairement qu’il répudie la direction qui lui est donnée. ». W.R. BION, Recherches sur les petits groupes , (1961), Paris, P.U.F., 1987, p. 36. ↩
-
ALAIN, « l’intérêt général, masque de l’intérêt personnel », Propos sur le pouvoir , pp. 99-102. ↩
-
BION, Recherches sur les petits groupes , pp. 22 et 34. ↩
-
Si Jacques NiICHET était reconnu comme un meneur, il avait une position éthique particulière dans la mesure où il utilisait sa fonction pour « sauvegarder la multiplicité des points de vue à l’intérieur même de la création collective », Bernard Faivre « Le plus mauvais de tous les systèmes », Théâtres en Bretagne , « Du collectif », Rennes, Presses Universitaires de Rennes, 1er semestre 2004, pp. 31-38. ↩
-
FREUD, Psychologie des masses , p. 62. ↩
-
FREUD, Massenpsychologie , p. 84. ↩
-
NIETZSCHE, Par-delà bien et mal , p. 161. ↩
-
Voir la communication de Kevin Crawford. ↩
-
Le numéro 53 des Cahiers Théâtre Louvain, Jean Vilar, Du tableau de service au théâtre, Notes de service de Jean Vilar rassemblées par Melly Puaux , présente à travers les notes que Jean Vilar adressait aux membres de la troupe, une conception particulièrement intéressante de cette fonction qu’il assumait, loin de toute tyrannie avec une grande sobriété courtoise. ↩
-
Charles JORIS dans son intervention parle d’utopie supérieure. ↩
-
Freud souligne que, dans les religions, le meneur peut être remplacé par une idée, une abstraction ( Psychologie des masses , p. 38). Par ailleurs, dans Totem et tabou , il évoque les sociétés primitives fonctionnant sans chef, mais non sans direction. ( Œuvres complètes , Tome XI, 1911-1913, Paris, PUF,1998, p. 198). ↩
-
Odette ASLAN, L’acteur au 20e siècle, évolution de la technique, problème d’éthique , Paris, L’Archipel, Seghers, 1974, p. 315. ↩
-
Voir à ce sujet l’analyse que fait Delcuvellerie de l’échec des « collectivités créatrices », É tudes théâtrales , n°26, pp. 139-140. ↩
-
Voir CHAPPUZEAU, Le Théâtre français divisé en trois livres , [1674], Lyon, Michel Mayer, Bruxelles, Mertin et fils, 1867, et Louis PETIT de JULLEVILLE, Les Comédiens en France au Moyen Âge , Paris, Librairie Léopold Cerf, 1885. ↩
-
Ces traces nous sont parvenues grâce aux contrats passés entre comédiens, mais aussi du fait des interdictions qui pleuvent sur les groupes de comédiens commençant à se professionnaliser. ↩
-
Documents inédits du 17e siècle communiqués par M. Delafosse, Revue d’Histoire du Théâtre , Paris, Société d’Histoire du Théâtre, 1948- 49, III, pp. 159-160. ↩
-
Françoise DECROISETTE, « Acteurs, marchands, corsaires », Les Cahiers de la Comédie-Française , pp. 48-54. ↩
-
PETIT de JULLEVILLE, Les Comédiens en France au Moyen- Â ge , p. 337. ↩
-
CHAPPUZEAU, Le Théâtre français , p. 82. ↩
-
Ibid., p. 86. ↩
-
Ibid., p. 115. ↩
-
Jean-Marie APOSTOLIDES, Le Prince sacrifié , Paris, Les Éditions de Minuit, 1985, p. 31. ↩
-
Christiane PAGE, « Analyse du fonctionnement du procédé du théâtre dans le théâtre dans la pièce de Molière, L’impromptu de Versailles , (1663) », texte inédit rédigé pour une intervention à l’IUFM de Versailles, Bibliothèque Gaston Baty, Paris III, 2002. ↩
-
À ce sujet, voir Martine de Rougemont, « L’entreprise théâtrale », et « Vie et statut des comédiens » dans La vie théâtrale en France au 18e siècle , 1988. ↩
-
Ibid., pp. 297-315. ↩
-
Marco CONSOLINI, « L’Idée de collectif dans le théâtre du 20e siècle : discipline et liberté du travail théâtral », Théâtres en Bretagne , p. 12. ↩
-
COPEAU, cité par Laurence LABROUCHE, « Trois exemples », Les Cahiers de la Comédie-Française , p. 74. ↩
-
Gustave LE BON, cité par Freud, in Freud, Psychologie des masses , pp. 17. ↩
-
FREUD, M assenpsychologie , p. 45. ↩
-
LABROUCHE, « Trois exemples », p. 73. ↩
-
FREUD part du présupposé que ce sont « des relations d’amour (exprimé de façon indifférente : des liaisons de sentiments) qui constituent l’essence de la masse (Freud, Psychologie des masses ,p. 30) ». Il insiste sur la différence qui existe entre masse avec meneur et masse sans meneur. Dans les deux exemples qu’il expose (l’Église catholique et l’armée) chaque individu est lié libidinalement, à la fois au meneur, et aux autres individus de la masse. Ces relations affectives fortes ont pour conséquence une perte de sa liberté individuelle et un rejet de tout individu n’appartenant pas à la même communauté. ↩
-
DELCUVELLERIE pointe cette question, É tudes théâtrales, n°26, p. 140. ↩
-
Sigmund FREUD, Malaise dans la civilisation . Lacan reprendra la position freudienne et la développera, notamment dans le livre VII de son séminaire sur l’éthique de la psychanalyse (Lacan, Jacques. L’éthique de la psychanalyse , Paris, Seuil, 1986.) ↩
-
Créé en 1927, le Cartel est une association juridique de metteurs en scène rassemblant de jeunes comédiens autour d’un projet moral et esthétique pour retrouver un théâtre de qualité. « Chacun des associés conserve sa pleine liberté artistique et reste seul maître de son exploitation », Jacqueline de JOMARON, in Michel CORVIN, Dictionnaire encyclopédique du théâtre , Paris, Bordas, 1991, p. 151. ↩
-
Les Cahiers de la Comédie-Française , (extraits des Souvenirs du Vieux-Colombier), Paris, Nouv. Ed. Latines, 1931, p. 58. Voir aussi : COPEAU, « Notes pour la troisième conférence du 17.03.1917 », Registres IV , pp. 512-513. ↩
-
Cf. note 41. ↩
-
FREUD, Psychologie des masses , p. 68. ↩
-
Je renvoie ici aux différents articles de ce volume. ↩
-
Cité par Monique SUREL-TUPIN, Charles Dullin, Thèse universitaire, 1984, Bordeaux, Atelier National de reproduction des thèses, Université de Lille III et Presses Universitaires de Bordeaux, 1984, p. 505. ↩
-
Charles DULLIN, Extrait du « Cahier personnel », p. 25, Surel-Tupin, Charles Dullin , p. 763. ↩
-
ASLAN, L’Acteur au 20e siècle , 1974. p. 270. ↩
-
Ibid.,p. 271. ↩